LAS VENTAS
« Las Ventas »
Madrid. Il est là ce soleil de plomb qui rejaillit sur le sable des arènes encore vides.
Car les taureaux sont derrière, dans l’antichambre, masses sombres et puissantes, captées par l’appareil photo dans le jeu qui unit leur corps ténébreux à l’ombre qu’ils projettent au sol. Qu’ils sont denses et vaillants. Les hommes s’affairent en silence, ils les jaugent plutôt qu’ils ne les jugent car ils les aiment.
Une femme éblouissante danse pour le taureau, l’accompagne de ses gestes et de ses sourires ensorcelants. Rythme du flamenco comme un battement de cœur. Elle le regarde, le trouble autant qu’elle le réconforte, et s’engage avec lui vers l’au-delà.
Muscles en tension, ondulations hypnotiques. Il y a de l’extase entre eux, deux cœurs qui battent la chamade, une émotion poussée jusqu’à l’épuisement. Un défi, une joie.
Le torero se recueille dans la chapelle, il sera bientôt au milieu du cercle, le public applaudissant, olé !, ou retenant son souffle dans un silence comme une prière que ne troublera même pas le froissement des éventails. Parfois, un ange passe.
C’est l’image, les images, de l’Espagne saisie dans sa passion, où l’art, la vie et la mort ne font qu’un, irrémédiablement liés, comme le sont l’ombre et la lumière.
Texte Ines Diarte